Le Président Sissi a rebattu les cartes !

Le Président Sissi est descendu dans la rue ou, plus précisément, dans l’arène politico-militaire et, quoiqu’en pensent certains, il a rebattu les cartes.
Les pays européens les plus hostiles à Haftar ont du, faisant assaut de plus ou moins bonne grâce, applaudir l’initiative et s’y ranger. L’Union Européenne, comme souvent à contretemps de la réalité des faits, a dénoncé le ridicule de l’initiative sans se rendre compte qu’elle s’en couvrait instantanément. Trump, lui-même, y trouve sans doute aujourd’hui la porte de sortie lui permettant d’échapper au forcing d’une administration qui le conduisait à tacitement accompagner Erdogan.
Pour la première fois depuis des mois, malgré le choix très risqué de sacrifier tous les gages territoriaux de l’Armée à l’ouest (risques en particulier pour le moral de l’ANL et pour la gestion de l’opinion internationale), Egypte et EAU reprennent la main.
L’initiative diplomatique du Caire offre sur un plateau la reprise d’initiative militaire auparavant impossible à justifier.
C’est, à mon sens, bien plus efficace que de tenter de « prendre Tripoli ». Car l’Etat Final Recherché s’est, à la faveur des options prises par Ankara, déporté du champ opératif vers le champ diplomatique. C’est son implication totale qui fait aujourd’hui de la Turquie le vrai point d’application pour la résolution de cette crise ouverte en 2011. Il s’agit à présent de mettre un terme aux ambitions régionales d’Erdogan.
L’Egypte, les EAU, la Grèce, Chypre voient leur priorité politique justifiée. L’appui à l’unification sécuritaire de la Libye n’était qu’un moyen parmi d’autres pour atteindre l’impératif de stabilité intérieure recherché par l’Egypte. La neutralisation du parangon des Frères Musulmans en Méditerranée est devenue la fin nécessaire contre laquelle il est à présent possible de masser tous les moyens disponibles.
Sur le terrain, cette concentration des efforts (un des trois grands principes de la guerre identifié par Foch) entre Syrte et al-Joufrah sera bien plus redoutable à affronter, même pour une Armée de l’OTAN dotée de capacités assurant l’ubiquité sur un territoire aussi vaste que celui de la Libye.
Au passage, la Turquie apprendra sans doute à ses dépens qu’en Libye plus qu’ailleurs, on ne “tient” pas le terrain. On noue des alliances.
Cela relève de la plus belle leçon d’art martial: exploiter l’énergie délivrée par l’adversaire.
La main est à présent sur le col. Erdogan pourrait bien finir par s’envoler …
Monsieur Ayachi Ajroudi.